Avant hier j’ai passé le cap des 3 mois sur la route. Je me rappelle encore très bien de l’article que j’ai écrit après 4 semaines qui tentait de répondre au “pourquoi” de cette aventure. Je me rappelle aussi avoir dit à certains avant mon départ, qu’après avoir traversé la Suisse en 3 semaines, j’ai réalisé qu’une fois que le corps s’était habitué au poids du sac, à l’intensité de la marche, à dormir au sol et à manger par terre, alors les jours s’enchaînent facilement. C’est un cap important à passer. Mais je me posais la question: y a-t-il un autre cap important à franchir après une plus longue durée? J’espérais trouver la réponse à travers ce voyage.
Aujourd’hui, un élément de réponse m’est apparu. Je sais maintenant que je ne pourrais pas faire ça pendant des années. Ça m’est impossible. Pas de cette manière en tout cas. J’ai trop besoin d’être utile au monde, et aujourd’hui, avec ce que je fais, ce besoin n’est pas assouvi. Je me sens en marge, à la poursuite d’un objectif égoïste. Certes, j’inspire un peu les gens, je leur montre un peu qu’on peut être heureux avec moins. Mais j’aspire à beaucoup plus. Quand je marche et qu’il fait beau, que la nature la plus belle s’offre à mes yeux, et que, comme maintenant, je trouve au milieu de nulle part une petite table à l’ombre à côté d’une source d’eau et que je peux m’y installer agréablement pour vous écrire un petit texte, alors oui je suis heureux. Et je vous raconte que je suis heureux, et ça vous rend aussi un peu heureux, parce que vous êtes des gens bienveillants. Mais à chaque fois que je suis vraiment heureux ici, je me dis: “J’ai tellement de joie! Si seulement mes amis étaient là pour que je puisse la partager avec eux, alors là, je serais vraiment, vraiment mille fois plus heureux.”
Bien sûr, je ne dis pas que vous n’êtes pas heureux dans vos vies. Vous êtes aussi certainement très heureux dans vos vies, et j’en suis ravi! Mais enfin… voilà, j’aimerais bien vous donner toute ma joie. C’est chouette d’être heureux, mais c’est un peu nul d’être heureux tout seul. Mon bonheur, ma joie, tout ça n’a de sens que quand je les partage.
A un certain moment j’ai pensé devenir ermite et consacrer plusieurs années de ma vie au bouddhisme, en solitaire, afin de réaliser “mon plein potentiel”. Mais je vois aujourd’hui, et j’en suis sur à 100%, ça ne me correspond pas. J’ai besoin de consacrer ma vie au sourire des gens. C’est la seule chose qui me rende vraiment heureux. J’ai besoin d’être utile, de rendre ce monde meilleur. Et j’ai besoin d’y consacrer toute mon énergie et y mettre à profit toutes mes capacités.
Je dois admettre que ça me gène un peu de vous dire tout ça, de m’exposer autant. Je me sens très vulnérable. J’ai un peu peur que vous me jugiez, que vous vous disiez “Pour qui il se prend, lui?” ou encore “Bonjour les bisounours!”. Ca ne se fait pas trop d’exposer publiquement ce qu’on a au fond du coeur. Mais bon, j’ai décidé de faire des efforts pour me sortir du paraître, de moins me cacher derrière ce que vous avez envie d’entendre pour éviter les railleries. Je crois que si on faisait tous un peu plus ça, on arrêterait de croire qu’on est si différents les uns des autres.
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